J'ai
découvert Le manoir des immortelles à l'occasion de la sixième session
de lecture commune organisée par le blog des Caro-lire.
Comme
les autres lecteurs de cette session, j'ai peu accroché aux 50
premières pages. A vrai dire, et en secret, bien que ravie que ce soit
une œuvre policière qui ait été tirée au sort, je me suis surprise à
soupirer dans ma barbe imaginaire devant ce qui me semblait être un
roman policier à la trame archi-convenue avec des personnages hautement
stéréotypés : un tueur psychopathe qui pense ses victimes potentielle en
terme de numéro et les tue à coup de faux (ok, c'est original, mais ne
suffit pas à maintenir l'intérêt sur 200 pages), un flic un peu à la
dérive dont la femme se meure, etc… En plus de ça, je n'ai strictement
rien compris à l'activité de celui qui s'est octroyé le doux nom
d'Hadès, ni à quoi correspondent les numéros avec lesquels il désigne
les gens, ni pourquoi il épie ces gens, tout ça reste très nébuleux. Et
moi, quand je ne comprends pas, ou plutôt rien, ben… je ressens plus de
la lassitude en zyeutant avec envie le livre d'à côté que de la
curiosité pour un mystère qui, sur le moment, ne m'intéresse pas.
Oui
mais voilà ! Au fur et à mesure, T. Jonquet fait prendre un chemin de
traverse au déroulement prévisible de son histoire. L'intrigue se noue,
Hadès parait plus humain, on soupçonne qu'il endosse son rôle plus qu'il
ne le subit, la vie personnelle de Salarnier s'accélère (ou se délite),
et l'on se retrouve vite fasciné par la mystérieuse Lola, et
décontenancé par le décalage entre son indifférence à tout et surtout à
Hadès et les effusions de l'amour passionné de ce dernier. L'histoire
n'est pas aussi simple qu'il n'y parait, et le chemin de traverse se
transforme vite en route secondaire qui nous permet différents niveaux
de lecture.
Mon
avis sur Le manoir des immortelles est que, en tant que roman
policier, l'intrigue est un peu légère, le déroulement de l'histoire
classique ; c'est un roman policier sympathique, sans plus. Par contre,
c'est bien écrit, le récit est maitrisé et l'histoire n'est pas exempte
de surprises. Les références à la Mort en tant qu'Art sont intéressantes
et apportent un plus à l'ouvrage. Les personnages secondaires sont bien
pensés, telle la mystérieuse Lola, personnage évanescent, entre la
femme éthérée et l'adolescente capricieuse, qu'on ne connait qu'au
travers des sentiments d'Hadès, ou le second de l'inspecteur, Rital
(non, il n'est pas Italien !), qui apporte un peu d'humour à cette
histoire pas très gaie :
- Alors, vous voyez bien… soupira Nadine.
- Oui, reprit Salarnier, le problème, c'est que le seul lien qu'on ait pu établir entre eux quatre…
- Les quatre sans cous ! lança Rital.
- Entre eux quatre, poursuivit Salarnier en secouant la tête, le seul lien, c'est vous…
(ben oui, ça me fait rire…)
Ce
que je retiendrai de cette lecture, et ce qui en fut la bonne surprise,
c'est la mise en parallèle de la vie de l'inspecteur et du meurtrier,
leurs points communs plus nombreux que l'on ne pense au départ, leur
attitude face à l'inéluctable. C'est aussi le choix divergent que chacun
d'entre eux fait pour faire face à l'absence de l'être aimé, et la
conclusion inattendue à laquelle nous invite Jonquet.
Dis-moi, ami lecteur, de celui qui espère ou de celui qui se désole, lequel est le plus fou ?
Salarnier
errait donc, de place en place, et le temps lui semblait se distordre,
comme dans une galerie de miroirs déformants. Certaines minutes pesaient
affreusement lourd, alors qu'en soufflant sur des journées entières, il
ne restait plus rien que des poussières d'instants futiles.
Ma note : *****
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